Emilie Frèche mérite-t-elle mieux que Besson ?

Couv_UnHommeDangereux

Quand une romancière nunuche entre dans le jeu de séduction d’un écrivain people un peu chelou, ça donne quoi ? Un ratage sans humour.

On ne dira jamais à quel point les SMS font du mal non seulement à leurs auteurs et leurs destinataires, mais aussi à la littérature. Dernière victime en date : Emilie Frèche , dont le dernier roman, Un Homme dangereux,  fait rigoler nombre de critiques littéraires s’envoyant depuis juin les meilleures perles par S.M.S. (on n’en sort pas).

Dans cet ouvrage à priori d’inspiration autobiographique (après tout, qu’importe ce qui relève de la réalité et de l’imagination), la romancière de Chouquette décrit le désarroi d’une jeune femme de lettres et scénariste, mariée avec enfants, dont le couple bat de l’aile. C’est alors qu’elle tombe sur Benoît Parent. Un pré-sexagénaire bien connu dans Saint-Germain-des-prés avec « une allure sévère, des petites lunettes à monture en titane qui n’arrangeaient rien», tenant une chronique hebdomadaire dans Le Point et qui « en dépit de ses distinctions  et de ses succès, (…) savait qu’il n’était pas Dostoïevski » – toute ressemblance avec, mettons, Patrick Besson, (ne) serait (pas forcément) fortuite… Ce vieux renard chercherait-il à «pécho» cette fille un peu perdue, à grands coups de textos potaches, enflammés ou plus généralement provocateurs ? On a beau prévenir la narratrice: attention, ce type qui « aime les Juives » est louche. La malheureuse, franchement nunuche, va alors entrer dans son jeu. Mais jusqu’où ? Explorer les mécanismes de la perversité – ou présupposée comme telle -, est toujours une entreprise intéressante, d’autant qu’Emilie Frèche a la plume plutôt alerte. Mais la désespérante naïveté de sa narratrice gangrène le récit, jusqu’à provoquer les fous rires nerveux.

On oscille alors entre la chick lit people et le roman bourgeois ennuyeux, parasité par un manque d’humour (volontaire) pathologique. Dès lors, les considérations sur l’antisémitisme, omniprésentes au coeur du texte et qui pourraient être intéressantes, alourdissent cette fiction déjà pataude, finissant de rendre cet Homme dangereux moins inoffensif que désolant.

 

BAPTISTE LIGER
(Stock, 286 p.) Économie : 19,50€