Daft Punk Unchained, l’épopée du duo le plus secret du monde

DAFT PUNK UNCHAINED

Les Daft Punk lèveraient-ils peu à peu la visière de leur casque opaque ? Réalisé par Hervé Martin Delpierre et diffusé ce mercredi 24 juin à 20h50 sur Canal+, l’histoire du groupe sera mise en lumière pour la première fois dans le documentaire Daft Punk Unchained. Images d’époques, témoignages de leur plus proches collaborateurs et anecdotes restées dans l’ombre, on y suit le parcours de Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo, depuis leur premier groupe de lycée jusqu’à leur triomphe en 2014 avec leur cinq Grammy Awards.

« Je vais faire un peu de provocation : ce n’est pas Daft Punk qui m’intéressait, c’était leur histoire », raconte Hervé Martin Delpierre, réalisateur, auquel il aura fallu presque deux ans de production pour Daft Punk Unchained. « C’était une histoire inédite, je n’avais pas envie de la louper». Pari réussi donc, avec ce documentaire revenant pour la première fois sur les origines du phénomène Daft Punk.

Retour en 1992. Thomas et Guy-Manuel – visages découverts – en compagnie de Laurent Brankowitz, le futur guitariste de Phoenix, jouent le dernier concert de Darlin’, leur groupe de lycée. Rien à voir avec les Daft Punk qu’on connait désormais, ceux qui refusent de montrer leur visage et orchestrent avec précision chacune des apparitions de leurs personnages de robots. Dévoiler un peu de leur mystère n’a pourtant pas été chose aisée : deux ans de négociation furent nécessaire à Patrice Gellé -producteur de BBC Worlwide – pour les convaincre. Mais même si l’absence des protagonistes est frappante, le documentaire parcourt la terre entière à la recherche de témoignages, de souvenirs et d’anecdotes de ceux qui ont eu la chance de croiser la route des fameux robots. Tous y racontent leur collaboration avec les Français. Les éloges pleuvent : Pedro Winter, Peter Lindbergh, Tony Gardner, Michel Gondry, Pharell Williams, Kanye West, Skrillex – dont on aurait pu se passer – ou encore Giorgio Moroder qui s’étonne du professionnalisme des Daft, qui le fait parler dans trois micros différents pour Giogio by Moroder. On retrouve des images d’archives de leurs premières séances photos, de leur collaboration avec DJ Eren lors d’une soirée électro en 1992 sur les toits du Centre Pompidou ou encore de leurs premiers débuts aux Etats-Unis dans le Winsconsin où Thomas, ayant débranché par erreur une prise jack, déclenchant alors un bruit strident qui aurait pu arrêter le concert, commence à jouer avec histoire d’en faire une basse. Petit génie.

Daft Punk Unchained, c’est aussi l’histoire sous-jacente de l’évolution et de la démocratisation de la musique électronique – la house notamment – qui, en quelques années, est passé du statut underground et alternatif à celui de musique du XXIème siècle. En somme, deux jeunes parisiens qui font (re– découvrir la dance aux Etats-Unis et une légende qui commence. Instant frisson d’ailleurs, quand Pedro Winter nous dévoile l’envers du décor de leur incroyable show à Coachella en 2006 : après de multiples refus, les Daft Punk acceptent enfin de se produire devant plus de 40 000 personnes, redéfinissant alors la notion de live et inspirant encore les prestations des DJ qui leur succèdent. Tout était secret et personne n’avait idée de ce qu’ils préparaient avec l’avance de l’argent qu’ils réclamaient depuis de nombreux mois aux organisateurs du festival. S’étant fait attendre plus d’une heure, ils se révèlent enfin en haut d’une pyramide de LED avec un spectacle de son et lumière subjuguant leur public hystérique. Coachella, donc, où ils auront marqué les esprits et où ils reviendront par surprise pour présenter leur nouveau single, Get Lucky, avant la sortie en 2013 de Random Access Memories, récompensés par cinq Grammy Awards, et dont les copies avaient été remise en mains propre par Peter Franco (leur ingénieur son) après avoir traversé les Etats-Unis en voiture avec l’enregistrement planqué dans sa voiture. « On avait juste peur de se faire braquer la voiture ».

DAFT PUNK UNCHAINED

C’est d’ailleurs en revenant sur l’éclosion et l’envol des Daft Punk que le documentaire se focalise sur la manière dont les deux artistes ont refusé d’entrer dans la cour du star system. Pas seulement un outil marketing, les fameux casques permettent également à Thomas et Guy-Man de préserver leur anonymat, prouvant que succès et vie privée peuvent être associés – avaient-ils donc prévu un tel engouement ?

Seul bémol : la narration chronologique. Même si on comprend la logique, l’affichage des dates nous gène un peu, à l’image d’une série à suspens comme Enquêtes criminelles. Bon, on les oublie assez vite, se laissant porter par les musiques et l’épopée du duo le plus secret du monde.

Bref, les Daft Punk ont réussi à créer un univers artistique unique, entre fiction et réalité, théatralité et humilité. Finalement, le mythe est tel qu’on ne sait plus vraiment si il y a bien quelqu’un derrière ces costumes de robots !

                                                                                                     Alice Froussard