Pour sortir du trou, fouettons-nous – Un couple qui S’M

Capture du 2015-07-10 13:08:11

Rédacteur en chef de «Talons aiguilles», Francis Dedobbeleer est un farouche militant de la cause SM. Loin du folklore, il nous confie: « Les couples SM sont ceux qui durent le plus longtemps.» Une solution pour tous les couples en crise ?

Récemment, dans une soirée sado-maso parisienne, une femme de 45 ans est offerte par son mari à des visiteurs. Tel un ballon dans une mêlée de rugby, la voilà palpée par des dizaines de mains, pelotée, attachée, doigtée, jusqu’à ce que, faisant signe à son maître, celui-ci disperse les brutes d’un geste digne d’un arbitre de football. Alors que la victime se rhabille, certains de ses tourmenteurs s’approchent et, respectueusement, lui font un baisemain: « Tu as été formidable ce soir. » Toute l’ambiguïté du SM apparaissait là : comment cette violence théâtralisée cache souvent un respect et un savoir-vivre dont pourraient s’inspirer bien des héros de base.
Quand on raconte l’anecdote à Francis Dedobbeleer, il sourit de satisfaction. Ce Belge de 38 ans, installé en France depuis cinq ans, est I’un des plus farouches militants de la cause SM. Tombé dans la potion sadique quand il était petit (il n’avait pas 18 ans quand il monta sa première revue), il dirige aujourd’hui des magazines comme Sentiment moderne et Talons aiguilles. Des revues indépendantes qui pratiquent le parler-vrai et ne se réfugient pas dans un SM esthétiquement correct. Son credo,  » Qu’on nous laisse avoir nos propres médias ! Je ne vois pas ce qu’il y a de choquant dans notre passion. Au contraire. Le SM érotise des sentiments humains comme le mépris, la domination, qui se trouvent dans toutes les têtes. Il y a toujours des rapports dominants-dominés dans la vie. Quand je vois certains couples bourgeois ou la façon dont Rocco Siffredi baise ses partenaires, je trouve ça bien plus dur et violent que n’importe quelle séance de martinets. »

TRÈs BEAUF
A I’entendre, le SM serait la plus franche des pratiques sexuelles puisque mettant en scène un rapport caché qui sous-tend toutes nos vies. Intéressant. Mais on ne se met pas au fouet comme ça. Dedobbeleer reste d’ailleurs dubitatif devant la vogue des soirées SM. « Je ne crois pas qu’on puisse devenir sado-maso par simple curiosité. D’ailleurs, je n’ai jamais voulu faire de prosélytisme. En ce moment, les soirées SM sont à la mode. Mais c’est très beauf, les gens s’achètent la panoplie et deviennent de vraies caricatures. Ils font du SM comme ils se mettraient au golf, sans y injecter leurs propres fantasmes. En réalité, les pratiques les plus perverses se font dans l’intimité, à l’intérieur d’un couple. »
Ce garçon poli et un poil timide évoque alors son goût pour l’esthétique Chapeau melon et Bottes de cuir ou pour la reconstitution, avec sa partenaire, de certains interrogatoires musclés, type KGB. « Cela demande que la personne ait totalement confiance. On ne peut pas aller loin si on ne la connaît pas. Le plus beau, c’est d’emmener quelqu’un dans son fantasme et de se laisser emmener par lui. Cela demande du temps, de la confiance. C’est sans doute pour cela que les couples SM tiennent si longtemps. » Comme disait l’écrivain anglais Martin Amis dans l’Information : « Si tu veux que ton couple tienne, n’épouse pas la femme que tu aimes le plus ou qui est la plus belle, épouse ton obsession… »

Patrick Williams 


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