LA FRANCE S’EMMERDE

Paru dans le numéro 122 de Technikart – mai 2008

Triomphe du cynisme soft et du politiquement correct ? Quarante ans après mai 68, la France se transforme doucement en un pays où la subversion est sans danger, l’impertinence, toujours mesurée et l’opportunisme, chic. Décryptage jusqu’au bout de l’ennui.

Si vous êtes fans de documentaires animaliers, ce qui peut arriver à tout le monde ,vous n’ignorez probablement rien des « moulins circulaires » : ces grands cercles que forment les fourmis en se déplaçant aveuglément les unes derrière les autres lorsqu’elles ont perdu leur chemin. Les biologistes estiment qu’elles mettent deux jours à mourir de fatigue, à force de tourner sans cesse, persuadées que chacune de leur voisine de tête sait où elle va (et donc qu’il faut rentrer dans le rang).
Quarante ans après Mai 68 et la célèbre phrase de l’éditorialiste du Monde Pierre Vansson-Ponté (« La France s’ennuie », publiée deux mois plus tôt), les fourmis se font toujours autant à chier tourner en rond. Le problème, c’est qu’entre-temps, nous sommes tous devenus un peu des fourmis (à défaut d’être des Juifs allemands). Notre moulin à nous, c’est une putain de fadeur qui nous tire chaque jour un peu plus vers le bas : une époque où le marketing a tout huilé jusqu’à l’idée même de subversion, un régime où le devoir de tolérance est devenu la nouvelle intolérance de salon, où le consensus se nourrit de toutes les impertinences à partir du moment où elles sont danger. Et le pire, c’est que ça n’est pas si grave que ça…

EMMERDEMENT GÉNÉRAL
A la différence de 68, l’ennui n’est pas aujourd’hui un mal-être social qu’il faut bousculer, c’est une réalité qu’il faut épouser, surtout quand on revendique comme beaucoup un zeste de modernité. L’important n’est plus de se poser des questions, mais de savoir les formuler à son avantage. Peu importe ce qu’on a à dire, pourvu qu’on le dise bien, au bon moment et aux bonnes personnes.
Vous êtes intelligent ? Faites le bien savoir, mais dites juste ce qu’il faut pour nous donner l’illusion d’être aussi malin que vous.Vous êtes drôle ? Faîtes-nous pouffer mais n’allez pas trop loin, on ne sait jamais. Vous êtes un rebelle ? Pas de problème, surtout si vous savez bien pitcher cette rage en vous qui bouillonne.
La France de mai 2008, c’est celle de l’emmerdement général mais d’une humeur égale. Une dictature du mou et des antiphrases où tout est dans tout et son contraire, et la vérité, nulle part : aujourd’hui, les provocateurs sont réacs, les méchants sont gentils, l’activisme est tranquille, la droite est réformiste, les vieux sont jeunes, les jeunes sont crevés et même le président s’avère un guignol contre qui rien, au fond, ne sert de gueuler puisqu’il n’a aucun pouvoir.
CYNISME SOFT ET EXTRÊME-CENTRE
C’est le triomphe du cynisme soft et de l’extrême-centre : cette philosophie qu’on croyait réservée à François Bayrou et qui consiste, non pas à avoir le cul entre deux chaises mais à être assis sur toutes les chaises en même temps. Et, surtout, à ne pas avoir peur de mentir effrontément.
« Dans une société qui présente le yaourt comme un médicament, la pub comme de l’art, la banque comme un accompagnateur de vie et les sociétés pétrolières comme des entreprises vertes, la vérité est l’exact contraire de ce qu’on ne veut pas entendre »,explique Antoine Darima, le cadre d’entreprise anonyme dont le Guide pratique pour réussir sa carrière en entreprise, avec tout le mépris et la cruauté que cette tâche requiert (La Découverte) s’impose comme le nouveau Bûcher des vanités d’un pays qui s’emmerde.
DIFFÉRENCE PROPRETTE
Principe de base : jamais d’informations négatives (surtout si elles sont vraies). « Aujourd’hui, le problème ne vient plus des difficultés mais de celui qui les annonce, ajoute Darima. Deux règles essentielles au pays de l’extrême-centre : la visibilité et la tangente. Tout ce que vous faites doit être pensé en fonction d’une exposition maximum et d’une prise de risques minimum.Vous devez être à la fois omniprésent et insaisissable, suractif mais sans aucune responsabilité, ne jamais rien affirmer qu’on pourrait vous reprocher plus tard, mais toujours présupposer. »
Rappel des faits : on n’a jamais vu autant de précautions oratoires dans les conversations en réunions (voir page 62), de doigts levés en forme de guillemets suivis de l’expression « On va dire » ponctuant la moindre information, d’anglicismes dans tous les sens (« Hello mister », etc.) pour modérer la première pointe d’agacement dans nos propos (surtout par mail). Tout se passe désormais comme si le simple fait de l’ouvrir était soit un alibi pour faire semblant de gueuler dans les clous (voir les Oui-Non des médias, page 59), soit trop dangereux pour construire des phrases avec un verbe.
MODERNITÉ ET APRÈS-RASAGE
Nouveau symbole du rocker d’extrême centre, Julien Doré – qui cite Duchamp et Warhol à tout bout de champ – met ainsi plus de trente secondes pour répondre à la moindre question (voir page 56). Ce n’est pas qu’il n’ait rien à dire (quoique), mais qu’il construit son discours : celui de la différence proprette aux saveurs calculées. Le même que celui qui fait aujourd’hui le succès des petits romans français à la Muriel Barbery (voir page 58) ou encore celui de GQ, « le magazine qui parle aux hommes sur un autre ton » (« Faut-il interdire le jean aux hommes politiques ? » « Osez la pintade de printemps »).
Xavier Romatet, le PDG de Condé Nast, société éditrice du magazine, confirme la recette sans complexe : « La vocation de GQ n’est pas de publier des scoops mais de devenir une marque repère. » Autant dire, un concentré de modernité dans un flacon d’après-rasage. Vous trouvez ça navrant ? Vous avez tort.
«LA SAGESSE DES FOULES»

« La démocratie algorithmique de Google rend désormais invisible ce qui n’est pas immédiatement accessible, explique James Surowiecki, auteur d’un essai sur le poids des masses en réseaux (la Sagesses des foules, voir aussi page 91). Nous sommes dans un cycle du mieux offrant par défaut : le jugement statistique du plus grand nombre. » Traduction : si vous n’êtes pas identifiable dans un supermarché comme GQ, vous passerez toujours pour un second couteau. Coïncidence ? Il y a cinquante ans, un étudiant écrivait sur les murs de la Sorbonne : « Il n’y aura plus désormais que deux catégories d’hommes : les veaux et les révolutionnaires. En cas de mariage,ça fera des réveaulutionnaires. » Et en cas de divorce ?
OLIVIER MALNUIT

 

JULIEN DORÉ, ROCKER EXTRÊME-CENTRISTE
UN GENDRE IDEAL
Ceux qui ont voté pour lui à «la Nouvelle Star» l’affirmaient: Julien Doré est un artiste «différent». On a passé de longs moments avec lui. Pas de bol, il ressemble à la majorité de ses congénères: faussement arty et vraiment propret.
Printemps 2007 : Julien Doré crève l’écran lors des « primes » de la Nouvelle Star. Après la Tortue en 2006, c’est la deuxième année qu’un candidat issu de la télé-réalité serait digne d’intérêt artistiquement. On en vient même à se demander si Julien ne multiplie les œillades rien que pour nous : il cite Duchamp,Warhol, porte un tee-shirt d’Herman Dune. Alors, on se pâme. C’est sûr, ce beau blond va plaire aux fans de Dalida et à ceux d’Anton Newcombe, ratissant les extrêmes en un centre sexy. Et on se met à délirer : avec Sébastien Tellier, lui et quelques autres, un esprit pop va souffler sur une France sous Xanax.
Printemps 2008 : sortie d’Ersatz, premier album de Julien. Jive/Epic (filiale de BMG) joue gros. La major va nous ressortir le grand écart popu-branché afin de tenir ses objectifs (400 000 ventes).
LUNDI 17 MARS 2008
Premier rendez-vous à l’hôtel Amour, un des lieux, avec le Costes, où les artistes sont parqués à l’abri : des endroits chics et branchés qu’Arthur Miller qualifiait de « cauchemar climatisé ». Julien sort d’un taxi avec son total look baby rocker (veste noire sur chemise noire, boots noires, vernis à ongles noir) et commande une bière. « Non, je ne bois pas, juste une pression de temps en temps, nous explique-t-il du haut de son mètre soixante-treize. De toute façon, c’est ma vie privée. » Mais euh, on n’a rien dit ! « Je refuse de valider ce côté rock attitude par la drogue, continue-t-il de sa voix grave. Un mec comme Sébastien Tellier le fait très bien. Moi, ça sonnerait faux. »
On commence à comprendre : Julien ne parlera que d’image, de représentation. Pas d’envie, de nécessité vitale. Les surréalistes – dont il se revendique –associaient drogue et création sans se demander si « ça sonnait faux ». Il hésite : « Peut-être mais la came ne doit pas être banalisée. Il faut absolument que cela garde un côté rite initiatique. » Julien n’est pas là pour disserter sur l’histoire obscure de la pop music mais pour promouvoir son album.
Parlons musique, alors. « Si j’en vends la moitié de ce qui est prévu, ce sera déjà top. Je ne vais pas commencer à me prendre la tête avec des impératifs de business. » Il assure avoir choisi ses collaborateurs sans pression. On le croit volontiers tant tout semble à la carte, disponible (voir encadré). Son manager lui annonce que Gondry pourrait réaliser le clip du single les Limites. Il semble ravi.
Le temps se dilate lentement. On va fumer une clope dehors. Tu viens ? « Non merci, je ne fume pas. » Le DA nous accompagne. Il veut savoir ce qu’on a pensé de l’album. A priori, ce folk-pop conçu pour plaire à tout le monde, cette musique « sans estomac », ne nous fait pas bander. On retourne à l’intérieur. Le repas se termine. On apprend que Julien vient de faire un shooting pour la couv’ de l’Express Style. Quel genre de fringues ? « Oh, des trucs qu’on m’a filés. »
Trois hypothèses : 1) Soit ce mec n’a rien à dire. 2) Soit notre gueule ne lui revient pas. 3) Soit il est le symbole d’une époque où la rebelle attitude n’est qu’une pose copiée sur le Manuel du rockeur junior.
JEUDI 20 MARS 2008
On poirote devant le Costes, autoproclamé « temple de la tendance branchée-lounge ». On croise Calogero et Quentin, le vainqueur de la Star Ac’. Un taxi dépose Julien Doré et Louise Bourgoin sous la pluie, comme elle l’avait prévu. Derrière eux, Christophe – celui qui chantait : « Chiqué, chiqué, c’est du faux, pas du vrai » – et une copine.
On revient sur la genèse de la rencontre Doré-Christophe. « C’est Virginie Efira qui a fait les présentations, nous explique l’homme des Mots bleus qui, crise de jeunisme oblige, a posé son synthé sur deux des titres d’Ersatz et ne tarit pas déloges sur son perdreau de l’année. Julien, grave : « Il y a un an, je nettoyais des façades à Nîmes. Aujourd’hui, je bosse avec Christophe, je partage des supers moments avec Edouard Baer et… je connais Judith Godrèche ! »
Julien a le respect des anciens, des connus, du plus grand nombre. Pour son album, s’il a délaissé son groupe Dig Up Elvis, il a l’intention de partir en tournée avec lui : « Eux me connaissent, ils sauront me remettre en place si je déconne. » Heureusement, Julien Doré déconne rarement.
Tout le monde carbure à l’eau plate. On parle art contemporain,Thomas Lélu, puisque Julien est cultivé. Il cherche ses mots : « Ouais, je ne sais pas, je l’aime bien. Sa démarche lui sert avant tout de protection. Comme le dit Jean-Yves Jouannais, l’ironie est une manière de se protéger du monde. » Un homme bourré passe à notre table. Doré le regarde avec des yeux éberlués. Les minutes s’égrènent. Louise Bourgoin s’éternise sur la terrasse. C’est elle qui a craqué en regardant la Nouvelle Star : « On partage la même vision du monde, nous sommes des provinciaux tous les deux », lâche la miss météo de retour à la table. Le dîner se termine, on cherche une vraie info, la voilà enfin : Julien nous annonce qu’il va faire la BO du prochain film de Judith Godrèche contant l’histoire d’un groupe de rock.
On remonte l’avenue de l’Opéra en repensant à cette réflexion de Sébastien Tellier, croisé un jour de tempête : « Ce qui me dérange avec ces télé-crochets, c’est le mensonge qui vient juste après. On nous fait croire que ces rockeurs peuvent détourner le jeu alors qu’ils n’en sont que le produit. »
MARDI 1er AVRIL 2008
Rendez-vous dans un café d’Etienne Marcel, encore un Costes. On évoque à nouveau son album : « Pour moi, ce disque a vraiment des allures de ballade romantique. » Et la production façon gendre idéal ? « Ah non, tu ne peux pas dire ça ! » Il revient sur ses années aux beaux-arts nîmois : « Aujourd’hui, l’art contemporain n’a plus vraiment de sens. Tu agis uniquement en fonction d’une reconnaissance future. La musique, elle, ne ment pas. » On pense à Carla Bruni pendant que Julien enchaîne : « Ce n’est pas facile de bosser pour une major mais j’ai réussi à tenir le cap. Je sais que certains vont me défoncer à cause de ça. » Encore son obsession de l’image.
On évoque Paris, la célébrité, les paparazzis… Julien réfléchit, ne lâche que du vide. On essaie de le mettre en confiance, on se livre quelque peu. Il détourne le regard. Moins mou, il cherche même à nous remettre à notre place : « T’es sympathique mais tu n’es pas mon pote. Moi, je me livre sur scène, pas devant les journalistes. » On parle politique. Il convient être de gauche mais refuse de dire… pour qui il a voté.
L’année dernière, on a vraiment aimé ce mec. Sa folie, sa sensibilité, sa reprise hallucinée de Screamin’ Jay Hawkins. Depuis quinze jours, on se retrouve dans un monde d’autocontrôle, de média training et de promo millimétrée. Julien Doré est un artiste qui semble tout droit sorti de Interstella 555, the Story of the Star System, le film de Daft Punk sur la fabrication des pop stars aux saveurs calculées. Julien est-il né comme ça ou est-ce l’entertainment qui l’a ainsi recentré ? Comment quelque chose comme le rock est-il devenu un refuge de tels mous du genou ? La mère de Louise l’adore, c’est sûr. C’est lui le gendre idéal, promo 2008.
MERCREDI 2 AVRIL 2008
Pavillon Baltard pour le prime de la Nouvelle Star. Brouhaha et petits fours. Julien n’a pas envie de répondre aux journalistes : « Ça me fait chier, je ne suis pas là pour ça. »
Au moment des adieux, il insiste sur les points qui ne doivent pas apparaître dans le papier. « Par contre, niveau politique, tu peux y aller. » Visiblement, Julien Doré ne se rend même pas compte qu’il n’a rien dit. Bienvenue dans l’extrême-centre.
ARNAUD LIÉVIN (AVEC BENOÎT SABATIER)

COMMENT FABRIQUE-T-ON UN «PETIT ROMAN FRANÇAIS» ?
ON PEUT PLAIRE À TOUT LE MONDE
D’Anna Gavalda à Muriel Barbéry et Olivier Adam, nos écrivains trentenaires accumulent les succès de librairie. Leur secret: des récits fédérateurs, où les bons sentiments et les bâillements se ramassent à la pelle.
Nous sommes le 20 mars, à la librairie Livre Sterling, avenue Franklin Roosevelt. Cet après-midi, événement ! Anna Gavalda, et son éternel look BCBG, vient dédicacer son dernier roman, la Consolante. Pendant près de six heures, une centaine de fans attendent patiemment dans la file, leur exemplaire à la main.
« Ce sont surtout des femmes, car il n’y a plus qu’elles pour lire des romans. Par contre, il y a aussi bien des adolescentes que des personnes âgées, témoigne Emmanuel Delhomme, directeur de la librairie et fidèle de la première heure. Anna a réussi à réunir autour d’elle un très vaste public. Parce que ses livres, ils sont peut-être faciles, mais au niveau psychologique, ils abordent de vraies questions de société. Et ça, c’est très fédérateur. »
LES RAVAGES DE DELERM
Fé-dé-ra-teur : le mot est lâché. Depuis quelques années, il semble coller à tout un nouveau genre, les « petits romans français », des livres sans grande ambition mais qui pullulent sur les étals de librairies. Avec un succès évident. Outre Gavalda, Muriel Barbéry et son fameux hérisson, mais aussi Olivier Adam,Vincent Delecroix ou encore Delphine de Vigan ont ainsi su tirer leur épingle du jeu.
Leurs points communs ? Une même génération de trentenaires biberonnés aux récits de Philippe Delerm (quand ce n’est pas les chansons du fils), une formation en fac de lettres ou de philo, un passage éclair dans une petite maison d’édition… Et une réputation d’auteur consensuel, gagnée à coups de bluettes contemporaines, avec leur lot de petits bonheurs et de drames quotidiens (l’enfer du périph’, la chatte de l’immeuble à chopé une cystite). Résultat : l’Elégance du hérisson dépasse aujourd’hui les 900 000 exemplaires, quand Anna Gavalda, elle, a déjà écoulé près de deux millions d’Ensemble c’est tout, ventes poches comprises.
LA VICTOIRE DES «PETITES GENS»
Les chiffres ont de quoi réjouir leurs éditeurs. Pourtant, quand on les interroge sur le succès de leurs poulains, ils auraient tendance à se rebiffer. « Franchement, je n’ai pas d’avis sur la question »,prétend ainsi Dominique Gaultier, directeur des éditions Le Dilettante (32 M€ de chiffre d’affaires rien qu’avec Gavalda). « Il y a quelques années, on expliquait le succès de Delerm et de sa Première Gorgée de bière en disant que les gens voulaient des livres courts. Et qu’est-ce qu’on a quelques années plus tard ? Les Bienveillantes ! Alors… » En effet. Mais Littell a eu le Goncourt, Gavalda pas (encore).
Plus diserts, les libraires, pas mécontents d’avoir trouvé leurs poules aux œufs d’or, insistent sur le caractère « résolument positif » de ces récits, prompts à déclencher l’empathie du lecteur pour ces « petites gens », confrontées aux réalités du quotidien. Renée, la concierge philosophe des beaux quartiers de Muriel Barbéry, récite du Spinoza comme la mienne du Jenifer, mais avec elle, le lecteur tient enfin la revanche du faible sur le fort, de la masse contre l’élite, de Ruquier sur Pivot. Et tant pis si le récit accumule les clichés et les invraisemblances.
SANS-PAPIERS KOSOVARS
Pour autant, ces petits romans n’ont pas grand chose à voir avec les croûtes de supermarchés de Guillaume Musso ou Marc Lévy. Pas trop mal écrits, gentiment besogneux, il leur manque un chouïa de souffle et d’envergure. Une littérature « moyenne » en somme, à la fois accessible au lecteur lambda et pas honteuse pour les mordus de la « Blanche ». De là à en faire le fer de lance de la littérature française, c’est une autre histoire. « L’amour des petites choses de la vie,c’est très bien, ça ne donne pas que des textes exécrables, juge d’ailleurs le critique et écrivain Pierre Jourde. Le problème, c’est que ces livres sont vendus avec le label “roman de qualité” par les libraires alors qu’au fond, la plupart sont calibrés au millimètre pour plaire, sans rien qui puisse vraiment heurter. »
Résultat : même quand ils ont l’air de s’engager, nos écrivains font dans l’extrême-centrisme. Dans A l’abri de rien (finaliste du Goncourt 2007, tout de même), Olivier Adam évoque ainsi la détresse des sans-papiers kosovars expulsés du camp de Sangatte. Soit une centaine de pages pleines de générosité mielleuse, mais aucune ligne pour dénoncer le système qui a produit cela. Trop polémique, sans doute. Du coup, on ne s’étonne pas que le livre se soit vu attribuer le… Prix du roman populiste. Décidément, les extrémistes sont partout.
JULIEN BISSON

«MAIS NON, JE PLAISANTAIS BIEN SÛR»
LES OUI-NON DES MÉDIAS
Il souffle un étrange vent sur les médias de ce pays. Jamais autant d’émissions poil à gratter n’ont vu le jour et jamais on ne s’est autant ennuyé devant tant de fausse impertinence. Enquête sur une mièvrerie très tendance.
C’est l’un des paradoxes les plus troublants du règne de la dictature du mou. Jamais le paysage médiatique n’a compté autant d’émissions dites de «media-watching», de comiques «snipers» ou de polémistes squatteurs de plateaux. Pourtant, jamais le sentiment de baigner dans un tel océan de conformisme ne nous a autant étreints.
Ça ressemble à quoi précisément la dictature du mou version médias ? A ce que l’on observe tout les jours à peu près partout, un patchwork de fausse impertinence, de lèche perpétuelle mêlées de faux-cultage intensif où tous – animateurs, chroniqueurs, journalistes et invités – miment une atroce bienveillance sous Tranxene, comme s’ils évoluaient dans une sorte de «Vivement dimanche !» sans fin.
ROUMANOFF, COMIQUE PUNK
«Il n’y a plus d’impertinence à la télévision, plus de moments de tension, plus de mauvaise foi, juste du rire, toujours du rire, et plein de promo», se désole David Abiker, chroniqueur Barbidou à France Info et collaborateur du site Internet «Arrêt sur images».
En quelques années, ceux qui, à tort ou à raison, incarnaient les dernières figures d’une certaine idée de l’anticonformisme médiatique (Elisabeth Lévy, Daniel Schneidermann, Paul Moreira, etc.) ont tous été relégués sur le Net comme de vulgaires has been. Sans doute n’avaient-ils plus raison d’être dans cette France où Anne Roumanoff passe pour une comique punk et où l’on vante les «interviews musclées» de Laurence Ferrari.
Inédite, cette situation n’a rien à voir avec la chape de plomb étatique qui régulait les médias dans les années 70. «Aujourd’hui, ce dont ont peur les chaînes, c’est de froisser une vedette qui, pour se venger, ne viendra plus ensuite dans les émissions. Ou d’agacer un annonceur qui retirera ses publicités des écrans», explique Philippe Vandel, lui-même gentille copie de Daniel Schneidermann, aujourd’hui à la tête de l’émission de décryptage mollassonne «Pif Paf» sur Paris Première.
«ÇA SUCE À PARIS»
Cette omniprésence du marketing dans l’espace médiatique a, avec lui, engendré l’apparition des «Oui-Non des médias», ces acteurs médiatiques, garants d’un système où la critique n’est jamais blessante, l’autocensure, un réflexe pavlovien et le copinage, un véritable lifestyle.
«Je déteste cette fausse impertinence qui consiste à lancer un pic à l’invité pour enchaîner sur: “Oh mais non, je plaisantais”», avoue Stéphane Guillon, intervenant à «Salut les Terriens». Cette dynamique schyzo consistant à mécaniquement modérer ses excès d’effronterie pour ne pas se faire d’ennemis est le guide comportemental des «oui-non» des médias.
Et ils sont partout, principalement dans les émissions qui se parent d’un vernis poil à gratter comme, par exemple, «Ça balance à Paris». «Un des chroniqueurs, a même joliment rebaptisé l’émission “Ça suce à Paris”», nous confie Marion Ruggieri, chroniqueuse à «Ça balance», donc, et caution girly-subversive de France Info avec «Elles se mêlent de tout», un billet d’humeur outrageusement inoffensif (l’e-cigarette, le phénomène des Ch’tis, le sommeil des enfants…).
LAURENCE BOCCOLINI EN LARMES
La situation est arrivée à un tel point de consensus mou, que ce sont les acteurs principaux de l’extrême-centrisme eux-mêmes qui font le constat de leur nullité critique. Paul Amar, qui en connaît un rayon sur la brosse à reluire: «Critiquer les artistes est, selon moi, un peu délicat et je me méfie de ceux qui s’érigent en donneur de leçons, avoue le présentateur de “Revu et Corrigé”, l’émission ultracentriste qui a remplacé à la rentrée 2007 “Arrêt sur images”. La parole est libre mais on ne peut pas dire tout et n’importe quoi, surtout quand on fait de l’info où l’on se doit d’être, non pas objectif, mais responsable», conclut Paulo, qui nous aura au moins bien fait marrer sur le coup.
Maintenant que l’objectivité a donc été remplacée par la responsabilité, l’univers médiatique en est devenu encore plus suffocant. La preuve: il suffit qu’un électron relativement libre comme Eric Naulleau l’ouvre un peu plus que les autres chaque semaine sur le plateau d’«On n’est pas couché», le talk show de France 2 présenté par Laurent Ruquier, et fasse chialer Laurence Boccolini pour que tout le monde trouve cela ultrasubversif.
ANTICHAMBRES DU MARKETING
«C’est vrai que je suis devenu le chien de la chronique dans le jeu de quilles de la promo, admet Naulleau. On en est arrivé à un tel niveau de bien-pensance qu’on n’a même plus besoin de police de la pensée. Tout le monde s’autocontrôle, s’autocensure.»
Etrange mais, en se transformant en antichambres du marketing, les médias nous renvoient paradoxalement une image plus juste et plus proche de notre société où tout n’est qu’acceptation contrainte, compromis honteux et hypocrisie généralisée. Et dans ce monde sans relief et vaguement chiant, quelque part, nous sommes tous des Paul Amar.
VINCENT COCQUEBERT

MAI 1968-MAI 2008 LA CRISE DE LA QUARANTAINE
Rapport au pouvoir, au sport, au reste du monde… On a beau fêter en grandes pompes les quarante balais de Mai 68, on oublie un peu vite les similitudes qui unissent cette époque à la nôtre. Happy birthday, l’ennui.

LE GÉANT ET LE NAIN
MAI 68 : Situation_ Le général De Gaulle règne sur une France qui ne pense qu’à profiter de la croissance. Tous se reconnaissent, PCF y compris, dans son centralisme démocratique sclérosé et cette monarchie élective instituée par la Ve république. Réaction_ Derrière la logorrhée gauchiste, les Français remettent d’abord en cause un rapport humiliant à un pouvoir hypervertical. Tous les délégataires de l’autorité (profs, parents…) en prennent pour leur grade.
MAI 08 : Situation_ Nicolas Sarkozy s’est fait élire en promettant que, désormais, le chef de l’Etat porterait de nouveau la culotte gouvernementale. Mais quand le Général survolait l’actualité de son aura historique, le petit Nicolas ne vise que le trône médiatique. Réaction_ Oubliant que, chez nous, domination rime avec discrétion, les Français se réveillent au son du bling-bling. Et face à un Etat coincé économiquement, ils cherchent refuge dans des institutions à hauteur d’hommes (assos, mairies, famille…).

LE SPORT ENCHAÎNÉ
MAI 68 : Situation_ A Mexico, les Jeux olympiques ont été préparés dans un bain de sang (200 morts après le massacre de Tlatelolco). La volonté du CIO d’offrir enfin les JO à un pays du sud «en voie de développement» se heurte aux limites de l’adéquation droits de l’homme/olympisme. Réaction_ Deux athlètes noirs américains dressent un poing ganté à la face de l’Oncle Sam. 1968, c’est aussi la naissance d’une véritable critique du sport, notamment marxiste. Les boycotts se profilent.
MAI 08 : Situation_ Le CIO aspire à l’universel – sa valeur ajouté économique en dépend. La Chine communo-capitaliste et son 1,3 milliard de clients-habitants, deuxième puissance au monde, est incontournable. Même les States et Coca-Cola opinent. Réaction_ Après les scandales du dopage et l’Anschluss des sponsors, le CIO redécouvre les joies du politique. Tibet, droits de l’homme, conditions des travailleurs: les opinions publiques occidentales seront-elles devant leurs télés ?

LES FEMMES AUX ABONNÉES ABSENTES
MAI 68 : Situation_ En 1965, une épouse peut enfin prendre un travail sans l’autorisation de son mari. Réaction_Bien que souvent reléguées au rôle de potiche durant Mai 68, elles seront les grandes gagnantes de l’histoire: fin en 1970 du «chef de famille», droit à l’avortement en 1975 (proposé par une femme de droite, voté par des hommes de gauche).
MAI 08 : Situation_ Ségolène Royal et Françoise de Panafieu se sentent davantage victimes de leur propre camp que de leurs adversaires. Les ministres font dans le syndrome «jeunes et jolies», et la parité ne changent rien dans les mairies et à l’assemblée nationale, les vrais lieux de pouvoir. Réaction_ Après le port du voile, l’écharpe tricolore.

LE MONDE BOUGE, LA FRANCE ROUPILLE
MAI 68 : Situation_Guerre du Viêt-nam, agitation sur les campus américains, guérillas en Amérique du sud… La France frise le coma pendant que le monde est au bord de l’infarctus. Réaction_ Pierre Goldman part dans les maquis au Venezuela et Ian Palach s’immole par le feu devant les chars de l’Armée rouge. Douce France.
MAI 08 : Situation_ Les Etats-Unis font dans le remake en Irak et la France s’apprête à envoyer quelques centaines de soldats en Afghanistan. Réaction_ Chavez chasse Guevara dans le cœurs des altermondialistes (il a du pétrole et des idées) et la Chine réinvente le «péril rouge», surtout celui de la délocalisation.

DES PARTIS DE GAUCHE OBSOLÈTES
MAI 68 : Situation_ Le PCF français refuse la destalinisation et s’accorde avec les gaullistes dans une foi commune en l’ordre moral. La gauche non communiste, emmenée par Mitterrand, pue la morne province. Réaction_ Le design jouissif des groupuscules gauchistes lifte la politique. Mitterrand fonde en 1971 le PS et attendra dix ans pour prendre le pouvoir.
MAI 08 : Situation_ La bipolarisation politique cache mal les carences des partis de gauche, incapables de représenter la «diversité», bouffés de l’intérieur par des rivalités de personnes pour un pouvoir inaccessible. Ce n’est plus le mouvement ouvrier, c’est le maillon faible ! Réaction_ La LCR arrive presque à faire de bon résultats électoraux avec un sympathique postier et les jeunes grossissent les rangs de manifs au grés de la plus grosse sono.
MARTOV

COMMENT DEVENIR CHIANT EN SEPT LEÇONS
LE GUIDE DE L’EXTRÊME-CENTRISME
Mollassons de la politique, petits couples à projets, caméléons de bureau… On les croise dans les dîners, au boulot, dans les fêtes ou même par mails. Nos conseils pour s’adapter le mieux possible aux situations.
SEXE
On flirtouille mais on apprécie moyennement la compagnie de célibataires queutards/chaudasses lors d’un dîner. Certes, on est toujours heureux de zyeuter le décolleté de la dernière conquête de notre pote crevard du cul, mais on sait qu’on aura droit aux remontrances de bobonne une fois dans le taxi. L’extrême-centriste évolue dans un monde où la culture du couple et l’achat immobilier sont érigés en valeurs ultimes. On se maque avec soin, on se prend un crédit sur vingt ans pour ce charmant F3 et on pond un grognard dès que possible (ça permet de nouveaux échanges socioprofessionnels, du genre «Elle est comment votre crèche, patron ?»).
Ne dites jamais_ «Alors, j’demande à cette meuf, vraiment la pure meuf hongroise ou ukrainienne, si elle veut bien m’accompagner aux chiottes.»
Mais dites plutôt_ «Tu devrais te maquer avec elle. Elle est plutôt mignonne et ça commence à avancer pour elle professionnellement…»

CULTURE
Face au raz-de-marée des sorties culturelles artistiquement «moyennes» du moment, on donne son avis, mais surtout pour ne rien dire: banalités sur la moustache de Jason «A bord du Darjeeling Limited» Schwartzman, lieux communs sur le concert d’Amy Winehouse et euphémismes sur le dernier livre de Valérie Tong-Cuong. La conduite à tenir: mesurer ses propos pour ne pas endosser le costume du crétin congénital de service ou apparaître comme une boule de haine aigrie. Le réflexe malin: glisser qu’on a soi-même un projet de roman chez une copine éditrice – ça fera toujours un nouveau sujet de conversation pour la prochaine réunion de la bande.
Ne dites jamais_ «Il a pondu une vraie merde, Bégaudeau. Et J’aimerais bien connaître le montant de son à-valoir.»
Mais dites plutôt_ «T’as lu le nouveau Bégaudeau ? Parce qu’il m’a l’air, attends, comment dire, enfin tu vois, quoi.»

VACANCES
Parce qu’il faut bien parler de quelque chose entre la poire et le fromage, on se demande poliment: «Alors, qu’est-ce que tu fais pour les vacances ?» Evidemment, la majorité de la tablée va au même endroit que l’année précédente, mais tient à tout prix à expliquer pourquoi: «Tu sais, La Rochelle, on s’en lasse pas. Le port n’a jamais la même allure selon les saisons ou les marées.» Et puis il y a le problème très embêtant des «erretétés» qu’on n’arrive jamais à prendre comme on voudrait. Bref, parler vacances entre extrême-centristes, c’est un peu comme parler boulot entre chômeurs de longue durée.
Ne dites jamais_ «Putain, j’en sais rien. J’ai un vague plan squat à Biarritz mais j’hésite, y a trop de beaufs là-bas.»
Mais dites plutôt_ «Je vais randonner dans les Pyrénées orientales avec ma mère et ma sœur. La montagne l’été, c’est un pur truc à découvrir, je déconne pas.»

POLITIQUE
On parle de politique, mais pas trop. Chacun a sa carte au PS (ou, au moins, «le cœur à gauche»), un avis sur les problèmes de leadership des socialistes et un «profond paradoxe» en soi. Le voisin de droite, qui se sent, dit-il, «de plus en plus radical» depuis mai 2007, se plaint du village du Gers où il a sa maison de vacances dont les villageois viennent d’élire un maire UMP ! Celui de gauche lui exprime toute sa sympathie. Au bout d’un quart d’heure de débat, les convives se mettent d’accord sur deux points essentiels: Sarkozy est méchant, Delanoë, super.
Ne dites jamais_ «Vous trouvez pas Marine Le Pen plutôt sexy depuis qu’elle a perdu ses kilos en trop ?»
Mais dites plutôt_ «Je trouve Clémentine Autain assez craquante. Mais je ne sais pas si je pourrais voter pour elle.»

DROGUES
Comme on se méfie de la cocaïne – ne surtout pas se montrer agressif envers un éventuel futur collègue extrême-centriste –, on se saoule gentiment et on spliffe méchamment (et parfois l’inverse, on est quand même un peu des oufs !) à l’occasion de dîners et de soirées avec les potes. Mais on prévoit le coup à l’avance: la babysitteuse est bookée (et gentiment prévenue qu’on risque de rentrer bourré), les soirées tombent toujours la veille d’un jour férié et, même méchamment éméchés, on garde assez de self-control pour ne pas sortir d’horreurs devant les autres.
Ne dites jamais_ «Je suis rentré chez moi, j’ai bu tout ce qui restait de la vodka de la dernière fois, et là je me sens comme une merde. Tu m’accompagnes Chez Jeannette ?»
Mais dites plutôt_ «Ouaaaaah, on a picolé comme des porcs, qu’est-ce qu’on s’est marrés ! On remet ça dès que possible, les gars !»

LIFESTYLE
On aurait aimé craquer pour une œuvre du scatophile Wim Delvoye à la dernière FIAC, mais on se retrouve avec de zoulies photos floues des nues d’Ellen Brotherus, ça jure moins avec le canapé Habitat et le Chesterfield achetés à la brocante du quartier Aligre, «et puis c’est plus simple quand les parents viennent dîner». Quant aux virées en bandes défoncées à la cambrousse le week-end (avec un alcoolo pas très net que personne ne connaît vraiment en invité surprise), on préfère y aller en compagnie plus choisie et raconter que «la campagne, franchement, c’est cool» avant de lâcher par bribes son emploi du temps trépidant: cueillette de champignons sous la pluie, apéro «sympa» et tarot jusqu’à 23h30, «mais c’est parce qu’on était crevés, hein».
Ne dites jamais_ «Les ploucs, ça va un moment mais ça devient vite limité.»
Mais dites plutôt_ «Y a pas à dire, la Picardie, c’est bourré de petits coins sympas.»

ENTREPRISE
Au boulot, l’extrême-centriste a une qualité et un défaut: il n’est pas créatif pour un sou. Du coup, il fait comme on lui dit, s’entoure de gens «sympas» qui ne lui feront pas d’ombre et adorent en discuter autour d’un «p’tit café» lors du debriefing. Ses mots d’ordre ? Ne jamais critiquer ouvertement le travail des autres, gagner de l’altitude et englober ce que disent ses adversaires, comme le conseille Antoine Darima dans son «Guide pratique pour réussir sa carrière en entreprise». Les expressions qui concluent ses mails («Voili voilou», «Je te fais des bises», «Merkiiii beaucoup»…) sont donc destinées à relativiser une attaque qu’il a du mal à assumer ou à appuyer une demande très pressante.
Ne dites jamais (par mail)_ «Bougez-vous tas de feignasses, on est grave à la bourre sur le projet qu’on devait rendre hier.»
Mais dites plutôt (par mail)_ «Bertrand nous ayant lâchement abandonné pour se marier (smiley rigolo), j’ai dû mettre les bouchées doubles ce week-end. J’attends la même chose de vous toute cette semaine. Merkiiii beaucoup.»

L. RÉMILA, R. TURCAT ET P. BORIES